Dans cet article :
- Comment faire la distinction entre hypersensibilité, hyperémotivité et hypervigilance
- Pourquoi l’hypersensibilité est une neuroatypie et non un défaut
- Quels facteurs influencent votre degré de sensibilité (traumas, microbiote, environnement…)
- Comment un accompagnement naturopathique peut transformer votre perception de vous-même
L’hypersensibilité est un mot très employé… mais souvent mal compris. On la confond avec l’hyperémotivité (c’est par exemple : le fait de pleurer facilement, ou de se mettre en colère de manière excessive), ou on l’associe uniquement à la fragilité.
Pourtant, c’est une réalité neurophysiologique bien plus complexe.
Hypersensibilité sensorielle, émotionnelle, et interoceptive
L’hypersensibilité peut se manifester à plusieurs niveaux :
- Sensoriel : Dans ce cas, les perceptions sensorielles sont perçues comme trop intenses : bruits trop forts, lumières vives, textures désagréables, réactions cutanées…
- Émotionnel : Dans ce cas, les émotions sont ressenties de manière amplifiée – les siennes comme celles des autres.
- Interne (interoceptive) : Dans ce dernier cas, il s’agit de la perception accrue des signaux corporels (douleurs, tensions, battements du cœur, digestion…).
Certaines personnes peuvent être hypersensibles sans en avoir conscience, car elles ont développé des stratégies d’adaptation : isolement, rationalisation, hypercontrôle, évitement sensoriel.
Hypersensibilité innée vs. hypersensibilité acquise
Il existe deux grandes formes d’hypersensibilité :
- Hypersensibilité innée : Elle est liée à une constitution neurobiologique spécifique, qui est présente dès l’enfance. On parle alors de neuroatypie.
- Hypersensibilité acquise : Elle est liée à une histoire personnelle, des traumas, un stress chronique ou une exposition prolongée à des environnements toxiques.
Dans la réalité, beaucoup vivent une combinaison des deux : une sensibilité naturelle, exacerbée par un contexte de vie plus ou moins adapté. Ce phénomène d’amplification peut être équilibré et volontaire lorsque l’on cherche à amplifier la sensibilité existante (dans les métiers d’art par exemple). Mais dans de nombreux cas, elle sera exacerbée par un environnement ou par l’activation d’une hypervigilance post-traumatique (par exemple : une maîtresse d’école qui devient hypersensible au bruit).
Quelqu’un qui n’est pas hypersensible à la naissance, peut le devenir par son vécu.
« L’émotion n’est pas une faiblesse, mais un message du corps sur ce qui compte. » — Antonio Damasio, L’Erreur de DescartesExemple d’article pilier
L’hypersensibilité est une neuroatypie
Loin d’être un « problème », l’hypersensibilité est une forme de fonctionnement neurologique minoritaire. Selon Elaine Aron, psychologue américaine qui a popularisé le concept de HSP (Highly Sensitive Person), environ 15 à 20 % de la population serait concernée.
Un système nerveux plus réactif
Les personnes hypersensibles présentent une réactivité accrue au niveau :
- du cerveau limbique (centre de traitement émotionnel),
- de l’insula, impliquée dans la conscience corporelle (interoception),
- du système nerveux autonome, souvent plus instable, avec une prédominance du mode alerte (sympathique ou vague dorsal).
« L’hypersensibilité n’est pas un trouble. C’est une forme d’intelligence sensorielle et émotionnelle. » — Saverio Tomasella, La Sensibilité, une force en soi
Une neuroatypie souvent associée à d’autres profils
On retrouve fréquemment des ponts entre hypersensibilité et :
- Haut potentiel intellectuel ou émotionnel
- TDAH (trouble de l’attention avec ou sans hyperactivité)
- Troubles du spectre de l’autisme (TSA)
- Troubles DYS (dyslexie, dyspraxie…)
Je croise d’alleirs fréquement au cabinet des personnes neuroatypiques qui ont également une ypersensibilité latente. Mais il est possible d’être simplement hypersensible, sans nécessairement être également HP, TDAH, TSA ou DYS.
Ce croisement rend parfois le diagnostic difficile ou confus, mais souligne surtout une grande richesse de perception… à condition d’apprendre à la réguler.
Dans tous les cas, que vous soyez neuroatypique ou non, si vous ressentez une hypersensibilté, il n’est pas nécessaire de passer par la case « diagnostique neuroatypie » pour apprendre à mieux la vivre.
Hypersensibilité, anxiété et hypervigilance : un trio fréquent
Chez de nombreuses personnes hypersensibles, on retrouve un état d’alerte permanent. C’est ce qu’on appelle l’hypervigilance. Elle naît souvent d’un terrain post-traumatique, mais aussi d’un environnement perçu comme imprévisible.
Ce mode de fonctionnement pousse à :
- anticiper constamment les dangers,
- ruminer,
- se méfier de ses ressentis,
- sur-analyser les interactions sociales.
Ce mécanisme, épuisant à long terme, peut déboucher sur un burnout, une dissociation corporelle, ou des symptômes physiques variés (troubles digestifs, insomnies, tensions musculaires…).
Quels sont les facteurs qui influencent votre sensibilité ?
L’intensité avec laquelle on perçoit le monde ne dépend pas seulement de la biologie. De nombreux éléments viennent moduler la sensibilité au fil du temps :
L’apprentissage d’une compétence sensible
Certaines professions (soignants, artistes, artisants, thérapeutes, commerciaux, diplomates…) demandent une écoute fine. L’hypersensibilité peut alors se renforcer par la pratique : affûtage des sens, empathie accrue, intuition affinée.
Même si certains domaines peuvent praître prédisposés, cette sensibilité peut se développer dans tous les corps de métiers. J’ai notamment accompagné un mécanicien qui pouvait préssentir la forme et l’état de ses pièces mécaniques avant même de les toucher !
Les traumas physiques ou émotionnels
Les traumatismes (accidents, deuils, maltraitance, violence symbolique ou psychique) laissent une empreinte sur le système nerveux. Ils entraînent souvent une hypervigilance chronique, une anticipation du danger même en contexte neutre.
Chez une personne avec une prédisposition hypersensible, la sensibilité se retrouve « captée » par l’hypervigilance et le post-trauma, et peut alors amplifier des sensation profondément désagréable. Le stress et l’anxiété peuvent alors sembler ingérables.
« Le traumatisme n’est pas l’événement, mais la trace qu’il laisse dans le système nerveux. » — Bessel van der Kolk, Le corps n’oublie rien
L’environnement de vie physique et sensoriel
Un lieu bruyant, mal éclairé ou encombré d’ondes et de sollicitations visuelles (clignotements d’écrans, notifications, publicités, couleurs criardes…) peut activer en continu le système nerveux. Ce phénomène est bien documenté chez les enfants neuroatypiques, mais il est tout aussi valable à l’âge adulte.
Les stimuli sensoriels constants ne laissent aucun espace à la régénération. Cela mène souvent à un état de saturation, qui peut se traduire par de l’irritabilité, une baisse de concentration, des troubles du sommeil ou même des douleurs diffuses sans cause organique apparente.
L’environnement psychoaffectif
Les relations humaines sont aussi des environnements à part entière. Un entourage critique, intrusif ou peu sécurisant peut générer une forme d’hypervigilance émotionnelle : on anticipe les réactions, on ajuste son comportement, on s’oublie pour préserver l’harmonie.
À long terme, cela désorganise le système nerveux et altère l’identité : la personne ne sait plus si ce qu’elle ressent est « vraiment elle », ou une réponse conditionnée à son environnement. Le besoin de validation externe prend alors le pas sur l’écoute de soi.
De façon plus subtile, la charge émotionnelle ambiante (famille en tension, collègues anxieux, conflits latents…) peut être perçue de manière exacerbée par les personnes hypersensibles, qui absorbent et somatisent ces ambiances comme des éponges.
Sans espaces de décompression, de nature, de silence ou de solitude régénérante, leur organisme reste en alerte, même sans “danger” objectif. Cet état d’hyperstimulation chronique épuise les réserves d’énergie et peut conduire à un effondrement physique ou émotionnel.
Le rythme de vie et la fatigue
Le manque de sommeil, le surmenage, les horaires décalés ou le non-respect des cycles (veille-sommeil, repas, repos…) réduisent les capacités d’adaptation. La personne devient une « éponge » à son environnement.
Les environnements asynchrones peuvent se retrouver par exemple lors de déplacements fréquents, ou pour un emplois alternant travail de jour et travail de nuit.
L’arrivée de jeunes enfants, l’accompagnement de proches en fin de vie ou avec un handicap lourd, et les troubles du sommeil quelles qu’en soient la raison seront autant de facteurs amplifiants une hypersensibilité déjà présente.
L’alimentation et le microbiote
Un microbiote intestinal déséquilibré impacte la production de neurotransmetteurs (dopamine, sérotonine, GABA…) et accentue l’anxiété ou la réactivité émotionnelle.
La mise en place d’une alimentation adaptée permet de fournir au corps ce dont il a besoin pour vivre son intensité. Elle permet également d’équilibrer ce microbiote, et d’améliorer ainsi la résistance au stress. Enfin, elle participe à la réduction des intolérances ou de l’inflammation chronique qui créent un « bruit » corporel constant.
Ce que nous travaillons ensemble en naturopathie
Dans mes accompagnement, le but n’est pas de « faire taire » la sensibilité ou de la « dominer », mais d’en faire une force. Voici les axes que j’explore en accompagnement.
Reconnexion corporelle : retrouver le lien avec soi
L’interoception est la capacité à percevoir ses sensations internes. Chez les hypersensibles, elle est souvent déréglée : soit surdéveloppée (trop d’infos), soit coupée (dissociation).
Grâce à des pratiques douces (body scan, respiration consciente, réflexologie plantaire…), nous réapprenons à dialoguer avec le corps sans peur ni rejet.
Gestion des charges émotionnelles et sensorielles
En séance, nous apprenons à repérer les signaux d’alerte (fatigue, tensions, mal de ventre, palpitations…), à les décoder et à y répondre avec douceur : micro-pauses, nutrition adaptée, mouvements de régulation, techniques de recentrage.
Alimentation et soutien du système nerveux
Une alimentation anti-inflammatoire, riche en oméga 3, en vitamines B et en magnésium, est souvent nécessaire pour calmer l’hyperréactivité. Au delà de cela, le microbiote est également un allié précieux pour réguler l’humeur et les réactions du système nerveux autonome.
Apprivoiser son hypersensibilité, c’est prendre un chemin d’autonomie
Vivre avec une sensibilité forte, ce n’est pas survivre en permanence. C’est apprendre à choisir ses environnements, à poser ses limites, à écouter son corps, et surtout à se reconnaître dans sa singularité.
« On ne guérit pas de son hypersensibilité, on apprend à l’aimer. » — Jeanne Siaud-Facchin, Trop intelligent pour être heureux ?
Si vous souhaitez mieux appréhender votre hypersensibilité et faire un premier pas vers elle, je vous met à disposition un atelier gratuit mais très puissant : « Mode d’emplois pour une hypersensibilité épanouie ».
N’hésitez pas à me partager votre retrour !
Prenez bien soin de vous.
Ambre V.
Liste des ouvrages mentionnés dans cet article :
- Damasio, A. (1995). L’erreur de Descartes. Odile Jacob.
- Craig, A. D. (2009). How do you feel — now? The anterior insula and human awareness. Nature Reviews Neuroscience.
- Porges, S. (2017). La théorie polyvagale : Neurophysiologie de la sécurité. Éditions Sully.
- Van der Kolk, B. (2014). Le corps n’oublie rien. Éditions Albin Michel.
- Aron, E. N. (1997). The Highly Sensitive Person. Broadway Books.
- Tomasella, S. (2018). La Sensibilité, une force en soi. Eyrolles.
- Siaud-Facchin, J. (2008). Trop intelligent pour être heureux ?. Odile Jacob.